Impact de la crise sanitaire sur la pratique de la télésanté

Le confinement, instauré mi-mars 2020 pour lutter contre la pandémie de Covid-19, a fait exploser le recours à la télésanté - pratique regroupant des activités (soin, consultation, etc.) exercées entre des professionnels de santé et leurs patients grâce au numérique et qui est composée, d’une part, de la télémédecine - pour les activités réalisées à distance par un professionnel médical (médecin, sage-femme, chirurgien-dentiste) et notamment la téléconsultation, et, d’autre part, le télésoin - pour les activités réalisées à distance par un professionnel paramédical ou par un pharmacien.

Depuis cette date, et afin de permettre le déploiement de ces pratiques, le gouvernement a assoupli les règles applicables à la téléconsultation et a mis en place des autorisations dérogatoires pour la pratique du télésoin.

  • Un bref rappel du cadre légal de la télémédecine et du télésoin s’impose

Télémédecine

Le cadre réglementaire de la téléconsultation repose sur deux principes pour pouvoir ouvrir droit à la facturation à l’Assurance maladie : d’une part son inscription au sein d’un parcours de soins coordonné avec une orientation initiale par le médecin traitant quand la téléconsultation n’est pas réalisée par ce dernier et, d’autre part, la connaissance préalable du patient par le médecin traitant (ou autre spécialiste) qui réalise l’acte à distance, c’est-à-dire que le patient doit avoir bénéficié au moins d’une consultation avec le médecin téléconsultant, en présentiel, dans les douze mois précédents.

A noter par ailleurs que depuis 2018, les actes de téléconsultation réalisés par des professionnels de santé, quel qu’en soit le motif, sont pris en charge par l’Assurance maladie, au même titre que les consultations physiques, pour tous les patients et sur tout le territoire, sous certaines conditions légales, réglementaires et déontologiques (voir tableau ci-dessous).

Télésoin

Contrairement à la téléconsultation, le recours au télésoin n’était pas permis avant la crise sanitaire, faute de parution des arrêtés prévoyant les conditions de réalisation du télésoin permettant de garantir leur qualité et leur sécurité ainsi que les catégories de professionnels autorisés.

Le télésoin, qui est l’équivalent de la téléconsultation médicale et de la télésurveillance médicale pour les professionnels de santé non-médicaux, est une forme de pratique de soins à distance mettant en rapport un patient avec un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux dans l’exercice de leurs compétences. Son cadre légal a été posé par la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé (Loi n°2019-774 du 24 juillet 2019) qui prévoit la pratique du télésoin par des professionnels de santé non-médecins.

  • Les évolutions réglementaires au cours de l’année 2020

La crise sanitaire a conduit le Ministre de la Santé à autoriser certains professionnels, de façon dérogatoire, à pratiquer le télésoin (voir tableau ci-dessous).

Les règles entourant la pratique du télésoin par les différents professionnels autorisés ont été précisées dans l’Arrêté du 23 mars 2020 prescrivant les mesures d’organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, et sont aujourd’hui précisées dans l’Arrêté du 10 juillet 2020 du même nom, et ayant abrogé celui du 23 mars ; elles ont en commun, notamment, de limiter le recours au télésoin à certains actes/soins définis, ainsi que d’imposer au professionnel non-médical d’avoir préalablement réalisé un premier acte/soin en présence du patient.

Ces dispositions particulières, autorisant certains professionnels à mettre en œuvre le télésoin, sont applicables tant que l’état d’urgence sanitaire est en vigueur, et ne vaudront donc plus, en principe, au-delà de cet état d’urgence sanitaire.

Quant à la téléconsultation, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire instauré par la loi du 23 mars 2020 (loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19), les règles de réalisation des actes ont été assouplies, afin de protéger les patients et les médecins des risques de contamination, rendant ainsi possible son déploiement. Depuis, les patients peuvent bénéficier de consultations à distance avec un médecin qu’ils ne connaissent pas, sans avoir besoin d’être orientés par leur médecin traitant (i.e., hors parcours de soins coordonné) et sans qu’il y ait eu une consultation physique avec le médecin téléconsultant dans les douze mois précédant la téléconsultation. Par ailleurs, en vue de pallier les disparités d’accès au numérique, la consultation par téléphone a été autorisée pour les femmes enceintes et certains patients (sans accès à un outil vidéo, en affection longue durée, âgés de plus de 70 ans).

S’agissant de la prise en charge des actes de téléconsultation, l’Assurance maladie rembourse 100% de la consultation jusqu’au 31 décembre 2021, là où la prise en charge est en principe (i.e., hors crise sanitaire), à hauteur de 70% par l’Assurance maladie et 30% par la complémentaire santé, comme c’est le cas pour les consultations physiques.

A l’instar de la téléconsultation, les acte de télésoin par vidéotransmission sont remboursés à 100% par l’Assurance maladie, pour les professionnels ayant une convention avec l’Assurance maladie, et dans certains cas par téléphone (voir tableau ci-dessous pour plus de détail). 

  • Quel avenir pour ces pratiques de santé à distance ?

Le recours à la téléconsultation et au télésoin a connu, depuis l’instauration du confinement le 15 mars 2020, un essor spectaculaire grâce aux assouplissements du cadre réglementaire, rendant ainsi ces outils essentiels pour l’accompagnement et le suivi médical et paramédical des patients.

Les assouplissements, étroitement liés à la pandémie de Covid-19, vont-ils s’installer durablement une fois l’état d’urgence sanitaire levé ?

C’est l’objectif annoncé par le gouvernement qui souhaite poursuivre le déploiement de la télésanté en maintenant la qualité de la prise en charge et qui a, à ce titre, pris des engagements pour ces pratiques dans le cadre des accords du Ségur de la santé. S’agissant de la téléconsultation, la volonté de maintenir l’assouplissement du principe selon lequel le téléconsultant doit connaître préalablement le patient a été affirmée. En ce qui concerne la pratique du télésoin, l’objectif est de la rendre pérenne pour plusieurs professions, et de l’ouvrir à d’autres pans de leur activité - en témoignent les récents outils[1] publiés par la HAS sur les critères d’éligibilité au télésoin et les recommandations de bonnes pratiques pour la mise en œuvre, afin d’accompagner un usage plus pérenne du télésoin par les professionnels de santé.

Tableau relatif au recours à télésanté par les professionnels médicaux et non-médicaux (1) avant la crise sanitaire et(2) dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

 

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