Réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières

La transposition de la directive européenne 2019/2121 à travers l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 et le décret n° 2023-430 du 2 juin 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales, a abouti à une réforme audacieuse des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales. À ce titre, elle introduit aux côtés de la procédure de fusion transfrontalière, la scission et la transformation transfrontalières.

Les mesures prises dans le cadre de cette réforme sont développées ci-après et visent à assurer une meilleure protection des parties prenantes et à garantir que les opérations transfrontalières se déroulent de manière équitable et transparente au sein de l'Union européenne en instaurant un cadre juridique harmonisé. Elles s’appliquent aux opérations dont le projet a été déposé au greffe du tribunal de commerce depuis le 1er juillet 2023.

  • Protection accrue des parties prenantes, publicité et droit de retrait des associés

La réforme accorde une attention particulière à la protection des associés, des créanciers et des salariés des sociétés françaises impliquées dans des opérations transfrontalières modifiant en ce sens les articles L. 236-25 et suivants du Code de commerce et assurant ainsi une sécurité accrue aux parties prenantes. Elle impose notamment la publication d'un avis informant les parties prenantes sur le projet et accorde aux associés minoritaires un droit de retrait en cas de désaccord avec l'opération. Les associés n'ayant pas exercé ce droit de retrait bénéficient également du droit de contester le rapport d'échange des titres devant le tribunal dans le ressort duquel est situé le siège social de la société.

De plus, pour renforcer la protection des créanciers des sociétés françaises concernées (dont les créances sont antérieures au projet d'opération transfrontalière), la réforme prolonge le délai pour former opposition. Désormais, les créanciers disposent de trois mois, au lieu de trente jours, à compter de la publication de l'opération pour exercer leur droit d'opposition.

En outre, la réforme préserve les droits et protections des salariés d'une société française qui participe à une opération transfrontalière. Ces derniers doivent être représentés au sein des organes de surveillance ou d'administration de l'entreprise. Avant le dépôt du projet de traité, l'avis des représentants du personnel doit être obtenu, ce qui implique que le calendrier de l'opération tienne compte des délais nécessaires pour cette consultation.

La réforme renforce également la transparence en matière d'opérations de fusion, scission et d'apport partiel d'actifs. Désormais, tout projet de traité relatif à ces opérations devra être mis à la disposition du public sur le site internet des sociétés participantes (article R. 236-3 du Code de commerce) et annexé au registre du commerce et des sociétés, améliorant ainsi l'accessibilité de ces informations pour les tiers concernés (articles L. 236-6, al. 2 et L. 236-19 et L. 236-27 du Code de commerce).

  • Contrôle de conformité effectué dans l’État membre de départ

La protection des intérêts publics est également renforcée par la mise en place d’une autorité de supervision dans chaque État membre dont le rôle est de veiller, dans le cadre du contrôle de conformité, à ce que les opérations transfrontalières ne soient pas effectuées « à des fins abusives ou frauduleuses menant ou visant à se soustraire au droit de l'Union européenne ou au droit français ou à le contourner, ou à des fins criminelles ». En France, cette compétence a été attribuée au greffier du tribunal de commerce.

  • Introduction en droit français de deux nouvelles opérations transfrontalières

La réforme introduit aux côtés de la procédure de fusion transfrontalière existante, les procédures de scission et de transformation transfrontalières.

Dès à présent, les sociétés immatriculées dans un Etat membre de l’Union européenne peuvent adopter une forme sociale régie par le droit interne d’un autre Etat membre en y transférant son siège social sans perdre leur personnalité morale (transformation transfrontalière).

Elles peuvent aussi tout en gardant leur personnalité juridique, transférer leur siège dans un autre État membre et se scinder en plusieurs sociétés immatriculées dans des États membres différents (scission transfrontalière).

Ce nouveau cadre offre ainsi une plus grande flexibilité à ces sociétés leur permettant de s'adapter à leurs activités transfrontalières.

  • Amélioration du régime des fusions, scissions et apports partiels d’actifs en droit interne

Par ailleurs, l'ordonnance consacre les opérations de scission et d'apport partiel d'actifs pour les sociétés par actions et les SARL grâce à un cadre juridique spécialement établi pour ces opérations et étroitement aligné sur celui des opérations françaises et des fusions transfrontalières.

  • Extension du régime des fusions « semi-simplifiées » aux fusions impliquant des SARL

La réforme étend le régime de fusion « semi-simplifiée » aux SARL, sous la condition que la société absorbante détienne plus de 90% des « parts ou des autres titres conférant un droit de vote » (nouvel article L. 236-12 du Code de commerce).

  • Extension du régime simplifié aux scissions entre sociétés par actions

Le nouvel article L. 236-21 du Code de commerce étend la scission simplifiée prévue pour les sociétés par actions aux scissions entre sociétés sœurs détenues à 100%. Cette mesure exclut actuellement les SARL mais il est possible qu’elle soit revue avant le 25 août prochain par la loi de ratification.

(iii)           Introduction de la scission partielle en droit interne

La réforme introduit la possibilité d'une « scission partielle » en droit interne, permettant à une société de réaliser un apport partiel d'actif au profit de plusieurs sociétés bénéficiaires, en conservant son existence juridique et en attribuant directement les titres rémunérant cet apport à ses propres associés.

(iv)           Obligation aux dettes en matière de scissions et d’apports partiels d’actifs

Un autre changement important concerne la protection des créanciers des sociétés impliquées dans une scission. Désormais, en cas de scission, la solidarité entre les sociétés participantes est rétablie (nouvel article L. 236-25 du Code de commerce). La société apporteuse assumera l’entière responsabilité des dettes transmises, tandis que la solidarité de la ou des sociétés bénéficiaires est limitée à la valeur des actifs nets qui lui sont attribués, évalués à la date d'effet de la scission (nouvel article L. 236-29 du Code de commerce).

  • Extension du régime des apports partiels d'actifs « simplifiés » aux opérations impliquant des SARL

Le régime de l'apport partiel d'actifs « simplifié » entre une société mère et sa filiale détenue à 100% est en outre étendu aux opérations impliquant des SARL, ce qui n'était auparavant applicable qu'aux sociétés par actions.

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